Poésie et vérité mathématique
Poésie et vérité, c’est le titre de deux beaux livres de poètes (Goethe et
Eluard), écrits dans des circonstances différentes et poursuivant des buts
différents ; je lirai quelques extraits d’eux ; de nombreuses formes de
vérités y sont mentionnées, mais pas celle qui est de nature
mathématique.
Pourtant, à la source des mots et des idées en Mathématiques comme
en Poésie, il y a une souffrance du même type, et un même mouvement
de l’âme pour la dépasser, ou pour vivre avec, en cherchant avant tout la
vérité, celle du monde réel, et celle du monde intérieur, du monde
sensible et des idées qui en sont les échos, certaines bien abstraites, en
apparence.
J’ai rêvé un temps d’écrire des textes de mathématiques qui soient des
poèmes, tout en étant des exposés rigoureux de problèmes, de théorèmes
et de démonstrations, qui toucheraient aussi à la vie des découvertes, à la
passion qui nous anime, de conjecture en conjecture, donc à la vérité du
travail mathématique. Certains textes ont correspondu à ce désir.
Pourtant l’obstacle de la rigueur partout présente rendait les choses très
dures à mener à bout. L’erreur hantait les pages.
Il existe des poètes, excellents, qui ont fréquenté de près les
Mathématiques, comme Coleridge (cf. Sarah Glaz), Lewis Caroll, ou
certains d’Oulipo (comme Queneau, Roubaud) ; quelques citations d’eux
nous éclaireront (Chiffres, Bords, Point). Cependant leur œuvre, pleine
d’humour, chargée de douleur, tournée vers le jeu, et les règles, me
semble loin ce que j’entrevoie comme mathématiques poétiques.
Pourtant des exemples convaincants existent, venant de mathématiciens
du XXème siècle, dont je souhaite lire quelques extraits.
Daniel Bennequin
Professeur émérite à l'Université Paris VII
6 décembre, 18h-20h
Salle Histoire, 45 rue d'Ulm, Paris